Manteau d’Arlequin - Gérard Fiorenzo
Dans ma tête, un manège tourne, grince, chante :
Mots, phrases, couleurs, parfums
Barbe à papa, Mickey pompon
De l’abyssal
Pensées de mes lointains aïeux
En chevaux de bois
Fiers, gais, tristes
Usés par le temps
Mais toujours là.
Fière allure sur leurs ergots
Tourne manège, chante cigale
Pleurniche fourmi, ruse renard
Ne juge pas les gens sur la mine
Société pestiférée ! le lion enquête
« Belle blague, l’âne condamné ».
La cour poursuit les misérables
Jean de La Fontaine ! il y a longtemps que je t’aime
Dans tes fables, je m’y suis baigné.
Papa Hugo romantique, sur la sellette
Grognard de Bonaparte
Hiver d’enfer, Moscou fumant
A l’heure où blanchit la campagne
Chansons des rues, chansons des bois
Léopoldine, Jersey, tables tournantes
Le poète est un riche qui possède
Terre, lune, soleil,
Leur écho dans les bois.
Bibliothèque de classe : Trésor qu’on effeuillait
Sans famille, Jacquou le croquant, Monte Cristo.
La chèvre de Seguin, La baleine blanche
J’en passe, ma mémoire perd haleine.
Ils sont là, dans le coffre à trésor
Ceux qui naviguent avec nous,
Toute la vie.
Ah peuchère ! ca sent la Provence, garigue, romarin, cigales,
Mistral, autan, zéphyr, clin d’œil à Mireille, au curé de Cucugnan
Mille récits facétieux, galéjades.
Mistral, Roumanille, descendants du grand Homère
Renaissance de la Provence
Dans sa langue, sa terre, son histoire.
« Quand le bon dieu doute qu’il a créé le monde,
Il se rappelle de la Provence. » Pardi
Toi, François, dont Verlaine fit son dernier mot
Villon, rebelle, insoumis, vagabond.
Ami des mauvais lieux, tavernes, et canaille
De rixe en meurtre, de cachot en pendaison
Je vis après toi, et n’ai pas le cœur endurci.
Je rêve à Flora la belle romaine, Héloise,
Aux neiges d’Antan.
Paul, Arthur, Charles ! tant d’autres !
Maudits.
Matins blêmes, alcools, amours innombrables,
Tavernes, lupanar, délire, opprobre des bonnes gens
« Pourtant, là, tout, n’est qu’ordre et beauté »
« Il pleure dans mon cœur, comme il pleut sur la ville »
« On n’est pas sérieux, quand on a dix sept ans ».
Je trinque avec vous dans l’invisible
Un dernier verre d’absinthe, nectar de Chatou.
Puis, lecture sous le manteau,
Entre mot et image
On n’est pas sérieux quand on a 14 ans.
Tintin, sa troupe : Milou, le fox à ses trousses,
Hadock, grincheux, ses millions de mille sabords
Tryphon Tournesol, le chercheur perdu dans son monde
Voyage au Tibet, en chine, en Afrique,
En Egypte, et même, jusqu’à la lune,
Et surtout dans la lune
Avant Neil Amstrong.