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Écrire à Muret avec le Prix du Jeune Écrivain
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30 octobre 2015

ANOUK - Marie Saint-Hilaire Tremblay

 

DSC_3262 (Copier)

Ma famille est une famille banale. Nous sommes deux enfants, parfois trois, quatre ou cinq. Tout dépend des malheurs des autres. Aujourd’hui, Anouk revient. Elle aura des orages sous les yeux, des histoires sur le corps et un restant de cœur. « On s’y fera », dit maman. La vérité, c’est que ma sœur ne s’y est jamais fait. Moi, je ne sais pas.

 

J’habite une chambre à ciel ouvert où les enfants apparaissent et disparaissent. Ma sœur et moi avons pris soin d’y clouer nos lits pour résister aux courants d’air. Nous avions l’habitude de noter soigneusement les noms des passants dans un calepin. Puis, nous avons égaré les pages et oublié les noms. Jour et nuit, nous secouons les draps, lavons les planchers, étendons les vêtements et dressons la table. Pour égayer les enfants, il faut être joyeuses, lumineuses.

 

 « Anouk arrive! » L’écho se répand dans la maison et je cours préparer le lit. Les couvertures doivent être rabattues et le pyjama déposé au centre. À l’évidence, ma sœur feint de ne rien entendre. « Allez, bouge-toi, tu n’y échapperas pas. » Elle redoute cet instant.

 

Anouk se pointera avec un sac de plastique à la main. Ses horreurs se découperont en angles parfaits. Ma sœur détournera les yeux tandis que je fixerai Anouk. Je ne lui poserai pas de questions, je guetterai l’accalmie en lui apportant un café bien fort. Je lui tracerai un cercle dans la chambre pour qu’elle s’allonge en silence. Aucune larme ne sera versée. Épuisée, Anouk dormira, une force triste dans les poings.

 

Au matin, je lui ferai simplement un bol de céréales. Une dame cognera à la porte. Elle dira « Ta mère s’excuse. Ta mère ne sait pas pourquoi, ne sait pas comment. Cette fois, c’est vrai : elle s’excuse. » Anouk et moi échangerons un regard, et quelques fois, croirons à nos adieux.

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